LES ANNÉES MILLIAT : SPORTS ET FÉMINISMES DANS L’ENTRE-DEUX-GUERRE (Florys Castan-Vicente)

Ouvrage publié le 24 avril 2024 aux éditions PUR dans la collection Archives du féminisme.

C’est dans le contexte de la première guerre mondiale que le sport féminin a pris racine et s’est développé au sein de la société française. Les hommes partis à la guerre, les femmes les ont remplacés dans les usines puis sur les terrains de football.

Le sport objet de lutte féministe

L’historienne Florys Castan-Vicente nous invite à plonger dans cette époque qui suit la Grande Guerre, celle des années 1920-1930 où les femmes ont décidé de prendre leur place dans le monde du sport. Le livre « Les années Milliat : sports et féminismes dans l’entre-deux-guerres” publié aux éditions PUR raconte comment les pionnières ont défendu le droit des femmes à faire du sport, au plus haut niveau, avec les mêmes ambitions que les hommes.

Au-delà des exploits sportifs, Florys Castan-Vicente raconte le combat sportif, politique et féministe, mené par les femmes face à la mysoginie encore de mise à l’époque. Il faut rappeler que Pierre de Coubertin lui-même considérait que ses Jeux olympiques doivent rester exclusivement masculins.

Trois figures émergent de l’ouvrage de Florys Castan-Vicente : la militante Alice Milliat, la provocatrice Violette Morris et la mondaine Suzanne Lenglen.

Alice Milliat la combattante

La Nantaise Alice Milliat, grande pratiquante d’aviron, s’engage à partir des années 1910 dans la création de compétitions sportives féminines au niveau international. Devant l’entêtement du CIO, comité international olympique, à refuser l’accès des Jeux aux femmes, l’ancienne rameuse fonde en 1921 la FSFI, fédération sportive féminine internationale et organise les premiers Jeux mondiaux féminins.

Alice Milliat est aussi diplomate que déterminée. Elle discute, négocie et propose des solutions sans céder l’essentiel : les femmes doivent pouvoir faire du sport dans de bonnes conditions, avec la même reconnaissance que les hommes. Grâce à elle, les compétitions féminines attirent des milliers de spectateurs et font la une des journaux. Le CIO ne cèdera que peu à peu et contribuera à la disparition des Jeux mondiaux féminins, au grand dam de son inspiratrice, longtemps oubliée par la suite.

Violette Morris la militante

Dans un autre genre, Violette Morris impose également les femmes dans le monde du sport. Si Alice Milliat incarne une forme de féminisme raisonnable, Morris préfère casser les codes. Elle pratique de nombreux sports réservés aux hommes (le football, la boxe, la course automobile…), porte des pantalons au mépris des usages, revendique ouvertement son homosexualité et même une certaine virilité.

Violette Morris fait du scandale sa liberté. Son parcours est controversé, notamment pour ses choix durant la Seconde Guerre mondiale. Mais l’auteure ne se permet aucun jugement. Elle démontre plutôt comment Violette Morris repousse les limites de ce qu’on attendait d’une femme dans le sport et dans la société. Elle complète en cela le combat d’Alice Milliat.

Suzanne Lenglen, la star

Le cas de Suzanne Lenglen est encore différent. La championne de tennis est admirée pour son style, sa classe et son jeu spectaculaire. Elle n’est en revanche pas une militante du féminisme. La grande Suzanne, par son indéniable talent et sa grande popularité, change malgré tout le regard porté sur les femmes sportives.

Selon Florys Castan-Vicente, le succès de Suzanne Lenglen contribue à rendre le sport féminin plus visible et plus acceptable. La championne, malgré ses caprices de star, incarne une forme de féminité moderne, plus grand public, qui ouvre des portes

Un combat féministe, avec ses limites et son héritage

Le livre « Les années Milliat : sports et féminismes dans l’entre-deux-guerres” rappelle que le féminisme sportif de l’époque provenait des couches aisées de la population et restait l’apanage des femmes blanches. L’auteure démontre aussi comment le monde du sport reste toutefois dominé par des hommes. 

L’ouvrage est passionnant et son écriture vive et accessible au plus grand nombre. Il s’ajoute aux ouvrages consacrés aux femmes qui ont changé l’histoire à leur manière. 

• « Les années Milliat : sports et féminismes dans l’entre-deux-guerres » de Florys Castan-Vicente (éditions PUR, 2025). 306 pages. 155x240mm. EAN:9782753597785. Disponible dans toutes les bonnes librairies et sur le site des Presses universitaires de Rennes.