Sport et Politique en RDA (Julien Beaufils)

SPORT ET POLITIQUE EN RDA 1969-1990 (Julien Beaufils)

Ouvrage paru le 4 novembre 2024 aux éditions PSB, Presses Sorbonne Nouvelle.

La RDA, république démocratique allemande, est un pays qui a connu une existence éphémère (1949-1990) mais qui a marqué son époque sur le plan sportif. L’Allemagne de l’Est, comme elle était communément appelée, compte 519 médailles olympiques, dont 192 titres, en seulement cinq éditions des Jeux olympiques d’été et six d’hiver.

La fabrique des champions du socialisme

La RDA s’est particulièrement distinguée dans les années 1970 et 1980 par les performances sportives de ses champions, et surtout ses championnes, dans des disciplines telles l’athlétisme, la natation, l’aviron et le patinage de vitesse. La chronique olympique rappelle de grandes figures telles la nageuse Kornelia Ender, vedette des Jeux olympiques de 1976, ou l’athlète Marita Koch, détentrice d’un record mondial du 400 mètres qui semble figé pour l’éternité.

Ces championnes ont marqué leur époque par leurs exploits, mais aussi par les soupçons qui les accompagnaient. Le public garde le souvenir de ces carrures imposantes, leur larges épaules, leur musculature surdéveloppée et leur voix grave, presque masculine. Les soupçons ont laissé place aux certitudes lorsqu’ont été découverts, après la chute du Mur de Berlin, des documents démontrant que les athlètes de RDA étaient pour la plupart dopées.

Il ne s’agissait pas de cas isolés. La RDA avait mis en place un système de dopage planifié et contrôlé par l’État. Rarement un pays a élevé à ce point le sport et la compétition au rang de priorité nationale. L’objectif était de faire briller les vertus du socialisme à travers les Jeux olympiques et toutes les épreuves sportives internationales. Le mouvement sportif disposait de moyens illimités. Les athlètes subissaient un entraînement à la pointe de la modernité et des recherches en biomécanique. Le dopage était pratiqué en masse, de manière scientifique et dès le plus jeune âge.

Un pays à la pointe du sport et du dopage

L’ouvrage que Julien Beaufils, maître de conférences en études germaniques, consacre au sport en RDA, a été rédigé à partir d’archives de la DHfK de Leipzig, Deutsche Hochschule für Köperkultur, une université spécialisée dans les sciences du sport où ont été formés la majorité des entraîneurs du pays.

Les documents pour la plupart inédits rappellent la dimension politique placée dans la performance par l’Etat est-allemand. Les recherches étaient placées sous le sceau du secret et les athlètes, lorsqu’ils se déplaçaient à l’étranger pour des rencontres sportives, faisaient l’objet d’une surveillance zélée par les agents de la Stasi. La RDA s’efforçait de briller sur la scène internationale tout en faisant de leurs méthodes un mystère.

Dès la création du pays, les 17 millions d’habitants avaient été conditionnés par la pratique du sport. Le gouvernement socialiste considérait la culture physique comme un outil politique et encourageait ses citoyens à pratiquer le sport au moins une fois par semaine. Une donnée inscrite dans la Constitution du pays en 1968.

L’ouvrage, publié aux éditions Presses Sorbonne Nouvelles, souligne en outre la puissance symbolique du sport dans la société moderne. Au-delà de son aspect divertissant, le sport incarne des idéaux physiques (la santé, la vigueur, la virilité) et les compétitions internationales renforcent l’identité collective et nationale. Le sport possède un pouvoir fédérateur et identitaire qu’il séduit les régimes les plus autoritaires. La RDA a poussé cette logique jusqu’au pire.

Sport et Politique en RDA (Julien Beaufils)
  • “Sport et politique en RDA (1969-1990)” de Julien Beaufils (Presses Sorbonne Nouvelle 2024). 388 pages. 150×210 mm. Disponible dans toutes les bonnes librairies et sur le site des PSN, Presses Sorbonne Nouvelle).